Avenir professionnel et la Voiture
Ma première, une Fiat 1100 cabriolet 1960
Achetée 500.- CHF en 1973
Ma première voiture : solide, simple, exactement ce qu’il fallait pour un couple avec un enfant. Pascal venait de naître.
Après de loyaux services les ennuis commencent. La courroie de ventilation du moteur lâche. C’est l’hiver, bien froid… Voulant absolument voir un concert au Casino de Montbenon je me dis que dans ce froid le moteur tiendra même sans ventilation. Fallait s’y attendre, dans la montée de Tivoli une fumée blanche bien fournie s’échappe par le capot avant… le joint de culasse a lâché. Je décide de le réparer démonte la culasse remplace le joint et fait réaléser la culasse. Une fois tout remonté la Fiat consomme une quantité phénoménale d’huile et une belle fumée bleue se dégage du pot d’échappement. Explication d’un mécanicien, la culasse étant réalésée et vu que les segments des pistons n’ont pas été refaits, l’étanchéité parfaite de la culasse aspire l’huile du moteur . Il aurait fallu reconditionner le moteur et, suivant le mécanicien, j’aurais alors mieux fait de ne pas réaléser la culasse mais uniquement procéder au changement du joint.
Les vacances arrivent et nous allons avec Pascal, tout petit bout de quatre mois, à Roquefort-les-Pins. Au départ de Lausanne, la tête dans les étoiles je prends la direction de Genève au lieu de celle du Valais. Arrivé à Genève je me rends compte de l’erreur et fais demi-tour. En repassant par Lausanne, par acquis de conscience je passe au Touring Club juste avant sa fermeture à 11h45. L’assurance en poche départ direction Valais puis arrivée à Roquefort chez les Grands Parents dix heures plus tard.
Réception de mes parents quelque peu électrique, je pensais avoir loupé mes études et attendais sans trop y croire les résultats de mes examens. Nous passons somme toute d’agréables vacances et celles-ci terminées, au moment du départ, ma mère m’embrasse en pleurs me disant « je vois ta vie comme un tunnel sans fin » Il est vrai que sans « papier » et avec un enfant dans les bras les choses étaient mal barrées. Donc départ un peu tristounet. Pour atteindre l’autoroute de Nice à Ventimillie la montée est raide. Par le rétroviseur Je vois le bleu qui s’échappe de l’arrière de la voiture et se mélange au bleu du ciel, spectacle méditerranéen et je m’exclame « quel beau mélange de nuances bleutées » Il est vrai qu’à l’époque on pouvait se permettre ces pensées, aujourd’hui inimaginables. j’ai la réserve de bouteilles d’huile moteur prêtes. Sur l’autoroute défilent les tunnels et les ponts. Entré dans le dernier tunnel avant la douane italienne le moteur émet soudainement un cliquetis. Je dis calmement à Jocelyne » on a coulé une bielle, le moteur est foutu » vu ma nonchalance elle ne me croit pas « c’est une blague me répond-elle » « Eh bien non il est bien HS » dis-je calmement. La prévision de ma mère s’avérait exacte ! Un long tunnel ! Après quelques hésitations au vu de mon aura auprès de mes parents, je décide quand même de leur téléphoner et leur demande de venir nous chercher. Drôle de quiproquo, en décrochant le téléphone ma mère m’annonce avoir reçu l’information comme quoi j’ai réussi mes examens. Vu le nombre d’événements que mon pauvre cerveau reçoit depuis quelque temps, je ne réagis pas. Surprise par mon silence, » tu n’es pas content ? » dit-elle « Oui » réponds-je mais je n’y crois pas encore tout à fait. La raison étant la suivante :
En effet, j’avais loupé deux fois la deuxième année de mes études de physique et donc me voyais définitivement exclu de l’Ecole Polytechnique. Mais en prenant le 1er semestre de la deuxième année avec le deuxième semestre de l’année redoublée j’avais une année complète réussie. Un peu tiré par les cheveux à vrai dire. J’ai quand même eu le culot avant de partir en vacances d’argumenter la chose au professeur responsable de ma volée et ceci à la cafétéria pendant la pause de 10h ! ! !
. Il me dit « pourquoi pas » mais vous devrez d’abord réussir l’examen propédeutique et on en reparlera. J’avais raté cet examen et il me restait plus qu’une chance. Rien de cette discussion n’avait été écrit, pas de procès verbal ! ! ! je me suis donc attelé tout l’été à préparer cet examen sans être certain que le professeur accepterait ou se souviendrait de notre discussion. Je partais perdant mais tenais bon.
Retour à l’épisode « panne ». Au téléphone après avoir reçu l’annonce par ma mère de l’état de ma « réussite » j’annonce l’état de ma voiture et demande à ce qu’on vienne nous chercher. Après une heure d’attente arrivent nos secouristes, mon père et ma mère au complet. Lui, malade d’indigestion et peut être aussi d’une forme d’indigestion de son fils, avait la figure d’un jaune d’oeuf. Malgré tout et courageusement nous revenons direction Roquefort avec les deux voitures, la mienne fort heureusement à ma grande surprise roulait toujours malgré son cliquetis de castagnettes. Mais par précaution je roulais sur la bande jaune d’urgence de l’autoroute à 40 à l’heure et mon père me suivait encore plus jaune, sur la même bande…, jaune. Nous arrivons finalement à demeure.
Voulant régler ma situation d’étudiant je prends un train pour Lausanne laissant Pascal et sa mère à Roquefort chez les Grand Parents.
Un coup de fil à mon professeur et me voici en face de lui. Je lui rappelle notre discussion passée et il me propose d’aller dans son bureau de l’Ecole Polytechnique. Je l’amène sur ma moto, situation cocasse, et l’angoisse au ventre, et nous nous trouvons dans son bureau. Là il me dit ne pas se souvenir de cet accord et me regarde gêné ne sachant pas trop quoi faire pour moi. Tout mon monde s’effondre. Après tant d’efforts pour étudier mon examen propédeutique je vois mon avenir revenir dans le tunnel ! Au bout d’un silence pesant il me dit: Si au moins vous aviez votre propédeutique… ce à quoi je réponds » mais je viens de le réussir » alors là il s’exclame » si vous me l’aviez annoncé plus tôt, mais évidemment vous pouvez continuer vos études » Je pense que ce fut un des suspense le plus dur que j’ai eu à affronter. Comme quoi l’avenir ne tient qu’à un fil.
Tout est bien qui finit bien et il y a bien évidemment une suite… pour la voiture
Je fais appel à Philippe, mon beau frère, pour m’amener chercher Pascal et Jocelyne à Roquefort. En route on écoute le CD « Sticky Fingers » des Rolling Stones dont plus tard avec Back Street Blues , on jouera de nombreux morceaux mythiques comme » Brown Sugar » » Honky Tonk Woman »
Arrivés à Roquefort, l’accueil des parents redevient normal et on ne parle plus de « tunnel » On embarque les passagers plus le petit berceau. Bien entendu on tombe en panne à Milan et Pascal est tout excité en regardant le mécanicien trafiquer le moteur. Réparation faite on repart.
Entre temps j’avais demandé au Touring Club auprès duquel je m’étais inscrit… de rapatrier la Fiat
Arrivés à Lausanne, bonne surprise, la Fiat est devant l’appartement et nous attend. Je l’essaie et remarque qu’elle roule allègrement avec son cliquetis. La fumée du pot d’échappement est toujours aussi consistante et je fais bien attention, pour diminuer son intensité, de ralentir à l’approche de la police. Un soir cependant en attaquant une rude côte je perçois une voiture de police interceptant un jeune à vélo moteur. Ouf me dis je ils sont occupés et j’accélère. Quelle fut ma surprise en regardant par le rétroviseur d’apercevoir les deux policiers entrer dans la voiture mettre le gyrophare et s’élancer à ma poursuite. J’accélère de plus belle m’engage dans la ruelle la plus proche espérant les semer. Rien n’y fait ils me dépassent effectuent une queue de poisson et me bloquent. Les deux policiers sortent méfiants de la voiture et l’un d’eux me demande d’ouvrir la vitre. « Vous ne voyez pas ce que vous faîtes dit-il ? » et moi : « non je ne vois rien » c’est un clin d’oeil car une épaisse fumée nous sépare. Résultat une belle amende et l’obligation de passer le contrôle technique ce que bien entendus je m’abstiens de faire. Je terminerais la vie de la Fiat la démolissant dans une course « stock car » la percutant contre d’autres voitures dans une démolition sauvage en forêt. Pierre Rossetti a voulu m’accompagner dans mes excès « stock car » et en roulant vite avec les roues de la droite dans la rigole on percute une grosse pierre qui projette Pierre contre le toit et le blesse à la tête le faisant pisser du sang. Il descend et je continue en projetant la voiture sur les carcasses entassées des voitures dans cette démolition sauvage. Finalement la Fiat émet un râle du ventilateur avant blessé puis fume et s’arrête. Paix à son âme.
…la vie est un long fleuve tranquille…
Villa Caragua de nos jours
Les autres voitures… A suivre